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Poèmes et images
Dans le village
Sous l’épaisse frondaison des muriers, les vers à soie s’endorment
Sous la véranda basse, les hirondelles viennent de pondre
Le paysan fatigué rentre au logis, la herse sur l’épaule
Midi, le jour semble interminable au chant des coucous
Hoang Duc Long (XVème siècle)
Impressions anciennes
Les feuilles de lotus sont vertes
comme des parasols verts
Les fleurs de lotus sont roses
comme des joues roses
Je ne cesse de penser à toi
et n’ai pu te revoir
Je m’attarde au bord de l’écran,
l’âme emplie de mélancolie
Phu Thuc Hoan (XVème siècle)
Les fleurs s’ouvrent sur ta tombe
Il y a quelques jours, ils t’ont tué
Ils ont jeté ton corps au bout du hameau
Avant de partir ils ont roulé des yeux menaçants
Ce type est un communiste
Que personne n’aille l’enterrer !
A peine ont-ils tourné le dos, qu’un beau cercueil peint de rouge
T’a porté jusqu’à la tombe, et pour t’accompagner,
Tout le village, toute la rue, petits et grands, gars et filles
Plus ils avancent, plus il y en a
Ta tombe sur la haute colline, cette branche de fleurs,
les enfants l’ont cueillie pour toi
Cette couronne, nos sœurs l’ont tressée,
Ces rosiers, des petits frères les ont plantés
Ta tombe, sur la haute colline
Les roses s’ouvrent
Leur parfum glisse aux alentours
Et eux, lorsqu’ils passent,
Leurs yeux de vautours n’osent regarder
Sur la tombe d’un communiste
Des roses rouges, rouges,
Comme si le sang devenait fleur
Sur la page d’histoire du pays
Thanh Hai (1930-1980)
Berceuse des enfants qui grandissent sur le dos de leur maman
O Mon petit Tai, toi qui dors sur le dos de ta maman,
dors bien sagement, ne tombe pas, pétale de fleur !
Ta maman décortique le riz qui nourrira nos partisans
Les coups du pilon bercent ton sommeil.
La fatigue de ta maman coule chaude sur tes joues
Ses épaules te font un oreiller bien agité
Son dos te fait le balancement du berceau et le cœur chante
Dors sagement, ô a-i… dors sagement, ô a-i
Maman t’aime ô a-i, maman aime nos partisans
O mon petit, rêve pour ta maman d’un riz tout blanc
Demain tu seras grand et ton pilon
Enfoncera le mortier profond dans la terre
O mon petit Tai, toi qui dors sur le dos de ta maman
Dors sagement, ne tombe pas, pétale de fleur
Ta maman sème le maïs sur le mont Ka Lui
Le dos de la montagne est grand, celui de ta maman tout menu
Mon petit, dors sagement, ne fatigue pas le dos de ta maman.
Nguyen Khoa Diem (né en 1944)
Dans mon village
Dans mon village, on lance les filets, on vit de la pêche
L’eau tout alentour et la mer au loin
Par temps clair et brise légère, dès les lueurs de l’aube
Les jeunes gars en cadence partent chercher le poisson
Alerte et ardent, le sampan, tel un beau coursier
Rapide est la rame, au long du fleuve un puissant élan
Ample comme l’âme d’un village, l’aile de la voile s’évase
Déployant son vaste corps blanc, elle rassemble le vent.
Le jour suivant, sur la berge accoste une joie laborieuse
Tous les gens du village viennent accueillir le retour du sampan
Grâce au ciel la mer est bonne, elle a gonflé les filets
Poisson frais aux reflets blancs
Pêcheurs tannés brûlés par le soleil
Corps à l’âpre saveur des lointains
Une barque au repos le long de la berge fatiguée,
Le sel mord les fibres du bois.
Aujourd’hui, de très loin mon coeur revoit tout
Eclat de l’eau bleue, poissons d’argent, voile de chaux
Ombre d’une barque qui fend le large, gagne le large,
Je rêve de senteurs âpres et salées
Thé Hanh (né en 1921)
Le Hameau de mon village se souvient toujours
Amis vous êtes partis
Ce jour là, il y a bien longtemps
Le hameau de mon village se souvient toujours
Amis vous êtes partis
Quand reviendrez-vous
Au hameau de mon village
Mon village est pauvre,
Tout petit près du fleuve, sur la berge
La bise glacée souffle sur les toits de chaume
Mon village est pauvre
Soleil et pluie l’ont mis en lambeaux
Filles et gars du villagent triment et peinent
Amis, vous revenez
Les toits se réchauffent, la maison est en joie
Vous revenez, amis
La joie crépite devant les sentiers
Des vagues de petits accourent le visage en bonheur et vous escortent
La vieille affairée au vêtement couleur de racines
Fête ses enfants revenus des forêts profondes
Mon village est pauvre
Toit de feuilles maison de bambou.
Hoang Trung Thong (né en 1926)
Le Bonze
Il n’est ni étranger, ni des nôtres,
Un crâne tout ras, des habits non ourlés
Devant lui des pains de riz gluant, offrande des fidèles
Derrière lui six sept dames, des bonzesses effarouchées
Un coup de cymbale par ci, un coup de gong par là,
Et la prière s’étire, se traîne, s’allonge
A force d’ascèse, peut-être sera-t-il Vénérable,
On le verra dodeliner sur le trône de lotus
Hô Xuân Huong (XVIIIème siècle)
Tags : poesie vietnamienne, pêche, village natal
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Commentaires
6Martine de royanMercredi 27 Novembre 2013 à 17:03poèmes et photos qui font rêver et qui nous font encore mieux connaître ce pays où je rêve de retourner!
j'ai la chance d'apoprendre le français à une jeune femme originaire de la régiion de Bac Ninh, et ton article m'apporte une aide précieuse dans la connaissance de ce peuple attachant . Merci
Merci beaucoup des amis francais. Je suis vietnamienne et maintenant je suis fier de mon pays et touchée par leurs articles pour présenter le Vietnam. J'aime ces poèmes, ces photos vietnamiens.
c'est parti tout seul. je reprends : ôtes-moi d'un doute : ne serais-tu pas amoureux du Vietnam ?
1martinederoyanVendredi 17 Mai 2013 à 18:15
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superbe ballade, merci pour ce partage